Algodystrophie : causes, traitement et évolution

  • Par Myriam Gorzkowski, mis à jour le 12/11/2024 à 16h11, publié le 07/07/2020 à 09h07
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Algodystrophie : causes, traitement et évolution
L’algodystrophie, ou syndrome douloureux régional complexe (SDRC), est une pathologie caractérisée par des douleurs sévères accompagnées de signes locaux , survenant la plupart du temps à la suite d’un traumatisme ou d’une intervention au niveau de l’appareil locomoteur. Ces douleurs peuvent persister plusieurs mois, voire plusieurs années et conduire à un enraidissement articulaire avec des répercussions importantes sur la vie quotidienne et sociale. Parfois mal comprise et vécue difficilement, elle nécessite une prise en charge multidisciplinaire au long cours. Quelles sont les origines du SDRC aux mécanismes encore méconnus ? Dans quelles circonstances se manifeste-t-il, et quelles sont les différentes alternatives thérapeutiques ? Pharma GDD répond à toutes vos questions sur l’algodystrophie.

Qu’est-ce que l’algodystrophie ?

L’algodystrophie, ou syndrome douloureux régional complexe de type 1 fait suite à un événement local la plupart du temps bénin, comme une fracture, une luxation, une entorse ou une intervention chirurgicale. Les douleurs surviennent quelques jours voire quelques semaines après l’évènement traumatique (souvent guéri), et leur intensité ainsi que leur durée apparaissent disproportionnées par rapport à la cause initiale. Elles sont accompagnées de manifestations cutanées locales ainsi que de gènes articulaires provoquant une altération des mouvements au niveau du membre concerné.

Le SDRC survient généralement après 40 ans et plus particulièrement chez les femmes. Il concerne le plus souvent les membres inférieurs (60 %). Les atteintes les plus fréquentes sont la cheville et le pied, ou la main et le poignet. Les épaules et les genoux peuvent également être touchés.

Contrairement au SRDC de type 2, dont l’origine est une atteinte neurologique (lésions des nerfs), le SDRC de type 1 est dû à une lésion de tissus autres que des tissus nerveux.

Symptômes de l’algodystrophie

La douleur, mais surtout son seuil de sensibilité très élevé par rapport à une stimulation, même faible, est certainement le symptôme le plus évocateur de l’algodystrophie. Elle est accompagnée de nombreux autres signes cliniques locaux qui se manifesteront de façon très variable d’un individu à l’autre.

L’évolution d’une algodystrophie se déroule le plus souvent en deux phases :
 
  • La phase dite « chaude » d’évolution progressive peut durer de 1 à 3 mois. Elle correspond à des manifestations liées à une inflammation, avec localement une sensation de brûlure ou de piqûre. La douleur provoquée par une stimulation locale, comme une pression ou le toucher, est toujours excessive par rapport aux stimuli. On peut observer chez certaines personnes une faiblesse musculaire ou a contrario des contractures. Les articulations environnantes sont raides. La peau au niveau de la zone douloureuse est chaude, rouge et œdémateuse. Une sudation locale est également constatée.
  • La phase dite « froide » correspond à la phase secondaire de récupération. C’est une période longue, de 6 à 18 mois environ, qui correspond à une évolution plus ou moins rapide vers la guérison. Les douleurs sont moins présentes, par contre les raideurs articulaires font leur apparition et la peau devient fine, froide, et bleuie. Elle est plus sèche et parfois recouverte de squames.

Depuis 2006, l’algodystrophie se définit et de diagnostique selon les critères de Budapest :
 
  • Une douleur spontanée, continue, non limitée, et disproportionnée par rapport à l’événement initial.
  • Présence de symptômes cliniques d’ordre sensitifs (sensibilité exagérée), sudomoteurs (sudation plus importante), vasomoteurs (œdème et changement de couleur et de température entre les membres atteints), moteurs (amplitude des mouvements modifiée, tremblements, faiblesse), ou trophiques (aspect de la peau et des ongles).
  • Absence d’autres causes.

Les causes du SDRC

L’origine d’une algodystrophie est principalement post-traumatique. Il peut s’agir d’une fracture, d’une entorse, d’une luxation ou d’une contusion. Elle peut également être provoquée par une immobilisation prolongée, comme un plâtre ou le port d’une attelle, ou d’une rééducation trop intensive et douloureuse. Enfin, un acte chirurgical notamment en orthopédie est une cause fréquente du SDRC.

Certains autres facteurs non traumatiques sont susceptibles de favoriser la survenue de ce syndrome douloureux régional complexe, comme des causes neurologiques (AVC, zona), des causes viscérales (infarctus du myocarde, tumeurs cancéreuses, thrombose veineuse profonde). Des origines médicamenteuses ont également été signalées (antituberculeux, barbituriques). Enfin, la grossesse, le diabète ou les troubles thyroïdiens peuvent favoriser la survenue de l’algodystrophie.

Les mécanismes physiologiques à l’origine des troubles ne sont pas encore totalement élucidés. Ils sont certainement nombreux, ce qui peut expliquer le nombre important de symptômes possibles. Un dysfonctionnement du système nerveux provoquant une intégration anormale du signal douloureux semble être une des causes. Une réponse immunitaire inappropriée est également évoquée.

Diagnostic du SDRC

L’algodystrophie est une maladie difficile à diagnostiquer, et le délai entre l’apparition des premiers symptômes et la pose du diagnostic est souvent important, ce qui va retarder la mise en place des thérapeutiques et favoriser son évolution vers la chronicité.
Le diagnostic de l’algodystrophie repose essentiellement sur l’examen clinique. Il est établi selon les critères de Budapest en fonction de la présence des différents signes cliniques spécifiques, et lorsque tout autre diagnostic possible est écarté. En effet, certains symptômes peuvent évoquer d’autres pathologies possibles associant douleurs et troubles cutanés, tels que des infections articulaires, neuropathies, polyarthrite, thrombose veineuse…

Comment évolue une algodystrophie ?

L’évolution du SDRC peut être extrêmement variable d’un individu à l’autre et totalement imprévisible. Elle peut guérir spontanément en quelques semaines, évoluer très lentement et persister de nombreux mois. La plupart du temps elle évolue positivement en 1 an. Une prise en charge précoce permet de réduire le risque de séquelles notamment au niveau de l’enraidissement des articulations.

Traitement de l’algodystrophie

Le traitement de l’algodystrophie est pluridisciplinaire et son objectif est de soulager la douleur, préserver la mobilité articulaire et la fonction musculaire, raccourcir son évolution et favoriser la guérison. Sa prise en charge multiple et globale associe plusieurs stratégies thérapeutiques. Si un traitement médicamenteux antalgique est souvent indispensable, notamment en phase aiguë, l’ergothérapie, la kinésithérapie, la neurostimulation et le port d’attelles sont des mesures complémentaires et essentielles. Un soutien psychologique est parfois nécessaire afin d’aider les patients.

Les médicaments

Un traitement antalgique au long cours adapté à chaque situation est souvent initié. Il fait généralement appel à des corticoïdes (prednisone) au cours des premiers mois d’évolution, des médicaments antidouleurs de niveau 1 (paracétamol) ou 2 (tramadol), ainsi qu’à des neuroleptiques (gabapentine), ou des antidépresseurs (amitriptyline) qui agissent sur les douleurs d’origine neuropathique. L’application d’un anesthésique local peut également être envisagée (lidocaïne).

Pour en savoir plus sur les médicaments contre la douleur, consultez notre fiche conseil sur les antalgiques

La neurostimulation

Le principe de la neurostimulation transcutanée est de soulager la douleur grâce à un courant électrique qui va brouiller le message douloureux au niveau cérébral, induire la libération de neurotransmetteurs antalgiques, et ainsi soulager le patient. Des électrodes positionnées sur la peau de la zone douloureuse vont envoyer des micro-impulsions électriques au niveau des nerfs. Leur intensité et leur fréquence peuvent être modulées en fonction de chaque situation.
Grâce à de petits appareils d’électrostimulation, il est possible de réaliser soi-même la stimulation électrique transcutanée (TENS). Certains modèles sont portables, ils pourront vous accompagner tout au long de la journée et rendre possible certaines de vos activités quotidiennes ou professionnelles.

La kinésithérapie

La rééducation occupe une place très importante dans le traitement de l’algodystrophie. Elle doit s’effectuer selon la règle de la non-douleur en phase chaude. En phase de récupération la kinésithérapie va viser à enrayer les raideurs articulaires et à récupérer la mobilité. Votre professionnel de santé adaptera les techniques et les soins à votre situation, comme les massages, le renforcement musculaire, ou encore la balnéothérapie.
La thérapie miroir est souvent très utilisée. Cette technique a été mise au point dans la lutte contre la douleur du membre fantôme suite à son amputation. La thérapie miroir consiste à tromper le cerveau : le patient fait des mouvements devant un miroir en cachant le membre atteint. Le cerveau va ainsi intégrer les informations visuelles normales qui vont alors inhiber les informations douloureuses induites par le mouvement.

Le port d’orthèse

La mise au repos en phase chaude est très importante pour soulager au maximum les positions et appuis induisant une douleur. Des orthèses, par exemple des orthèses pouce poignet, seront utiles pour maintenir l’articulation douloureuse temporairement. Le port de chaussettes ou de bas de contention peut contribuer à réduire l’œdème. Par contre une immobilisation stricte est à éviter.

Le soutien psychologique

Les douleurs provoquées par une algodystrophie deviennent très souvent chroniques et peuvent impacter l’état psychologique du patient avec une altération de l’humeur, de l’irritabilité, de l’anxiété, ou encore des troubles du sommeil. Un soutien est souvent nécessaire. Différentes techniques de relaxation, de sophrologie ou encore l’hypnose pourront contribuer à rendre la douleur supportable et diminuer la prise de médicaments.
Les symptômes anxiodépressifs souvent retrouvés au cours d’une algodystrophie ne sont plus considérés comme un facteur de risque, mais comme la conséquence du ressentiment psychologique de cette pathologie.

La prévention de l’algodystrophie

La douleur joue certainement un rôle dans la survenue du SDRC. Les douleurs post opératoires représentant un important facteur de risques, des mesures de prévention ont ainsi été mises en place notamment suite aux opérations en traumatologie et d’orthopédie. Il s’agit de prendre en charge la douleur post opératoire, de limiter l’immobilisation et d’établir des protocoles de rééducation progressifs et individualisés.

Conclusion

L’algodystrophie est responsable de douleurs neuropathiques chroniques parfois sévères pouvant conduire à un enraidissement articulaire. Elle survient généralement quelque temps après un traumatisme, peut perdurer et s’avérer handicapante pour le patient. Le traitement inclut la prise de médicaments pour soulager les douleurs ainsi que des mesures de rééducation. Un soutien psychologique est parfois nécessaire en raison de son impact psychologique et social. Le diagnostic précoce, pas toujours facile à établir, est cependant indispensable afin de mettre en place une prise en charge rapide, et ainsi éviter l’évolution chronique et la survenue de séquelle articulaire.